Cela fait maintenant 3 ans que je pratique le base, du verdon à Lauterbrunnen et ailleurs. Il y a longtemps que j’avais envie de m ‘exprimer sur ce forum mais j’y ai souvent renoncé, estimant que certaines interventions affligeantes se passaient de commentaires.
Mais ceci dit, à mon tour de réagir et de donner mon point de vue.
J’aimerais vous faire part de quelques réflexions et constatations (qui n’engagent que moi, bien sûr), en particulier sur la gestion des problèmes éventuels liés au cadre et à la pratique.
Sans vouloir jouer les « has been » et autres nostalgiques d’une époque heureusement révolue, je tiens à préciser que je suis moniteur de parapente et que j’ai commencé à voler en 1987. Je vous épargnerai tous les détails de ce que pouvait être le vol libre à cette époque, notamment l’enseignement. Quelques « instructeurs » sans scrupules ont gagné à juste titre leurs surnoms de « bouchers ». Parallèlement, il existait déjà en ce temps là des écoles sérieuses, gérées par des gens compétents. Certains ont payé très cher d’être passés entre de mauvaises mains, par hasard…
Rappelons également que la majorité des pilotes n’avaient aucune expérience aéronautique, du matériel précaire et des connaissances aérologiques souvent plus que limitées :
Trop de vent ? T’inquiète ! on va aller décoller de l’autre coté…
Qui connaît ce dicton ironique, bien révélateur de l’époque? :
« Vent du nord…. :encore un mort ! »
Il y a eu beaucoup d’accidents par ignorance ou inconscience, mais bref, tout cela c’est du passé, je l’espère.
Néanmoins, le vol libre a connu des difficultés tellement similaires a nos préoccupations actuelles qu’il serait dommage de ne pas s’inspirer des solutions qui ont été trouvées pour avancer et légitimer notre sport.
De plus nous avons, nous, la chance inouïe, grâce à la persévérance et a la détermination de quelques « pionniers », de pouvoir disposer de matériels « 4 étoiles »..
La pratique :
Aujourd’hui nous en sommes encore et toujours a l’initiation entre potes qui se déroule avec plus ou moins de bonheur : Les même causes produisent toujours les même effets.
Quand on voit quelque fois l’accompagnement de débutants, sur des exits pas adaptés, sans aucune marge d’erreur en cas d’une mauvaise orientation, avec des conditions météo plus qu’aléatoires, je me dis : finalement il vaudrait mieux qu’il existe des écoles ! (Si, si je le pense !)
Le sujet n’étant pas de débattre sur le bien fondé de l’existence d’une structure professionnelle, mais d’aborder les problèmes auxquels sont confrontés les débutants (ça existe en Norvège).
Où l’on apprendrait par exemple à éviter les erreurs les plus courantes, à choisir un site, a reconnaître ses particularités, à faire une approche correcte et à renoncer aussi parfois...
En parapente on dit :
« Quand on ne sait pas se poser précis, on choisit des grands terrains ! » …
Quand on confond brise et vent météo il suffit d’ouvrir un livre de météorologie...
En base, ça n’a pas l’air si évident : « c est quoi ? on verra bien… »
Ah si ! Très important : le facteur chance ! Quand on débute, Il faut avoir la chance de connaître (ou de ne pas connaître !) Quelqu’un de responsable, qui ait un brin de lucidité, de pédagogie, de conscience du danger
?
Qui apprécie réellement son pote ? Qui soit à son écoute et pas à celle de son ego..
Questionnez-vous vraiment sur les motivations réelles de votre accompagnant.
Le genre : un ami qui vous veut du bien. Courage les gars ! Et méfiance !
Mieux vaut être seul que mal accompagné
J’admets que pour le premier saut, c’est avant tout une démarche personnelle. Il n’empêche que, quand on débute, on n’y comprend pas grand chose et ce n’est pas forcement idéal de griller tous ses jokers, d’entrée de jeu.
Des accidents il y en aura malheureusement toujours, personne n’est bien sûr à l’abri, quelque soit son nombre de saut. Par contre, on peut en éviter beaucoup, définir quelles sont les réelles compétences dont un base-jumper a besoin (et pas seulement une expérience de chute !), quels sont les spots pour les débutants (peu en réalité!) Ce serait déjà pas mal...
A ce sujet le super topo que nous prépare Erich sera, à coup sûr, une mine de renseignements utiles. Je rigole déjà à l’idée que tous les réfractaires de la première heure, s’empresseront finalement, comme tout le monde, de se le procurer.
Une meilleure accidentologie serait très bénéfique pour déterminer les causes réelles, détailler précisément chaque cas et en tirer des leçons, pour qu’au moins nous évitions, autant que possible, des répétitions inutiles.
Le cadre: (légal ?)
Qu’on le veuille ou non, il faudra se fédérer. Je comprends les réticences de certains et moi aussi j’aime cette joyeuse anarchie actuelle. Mais je ne vois pas d’autres issues plausibles.
Croire qu’on pourra sauter encore longtemps de cette façon peut, peut-être, correspondre à une image « hors la loi » qu’aimeraient se donner certains, mais dans un pays qui se fait un point d’honneur à réglementer absolument tout, je doute..
En tous cas le prochain chalenge sera de réunir tous ces individualismes, mais avec de nombreux avantages à la clef.
Les pratiquants de tous horizons serons bien inspirés de s’unir.
Et si cette nouvelle forme de pratique de la montagne semble une activité susceptible d’être englobée dans une fédé de montagne, pour ce qui est de la pratique urbaine cela me paraît objectivement impossible..
Nombreux d’entre nous ne laisserons jamais passer l’opportunité d’un beau saut d’une structure artificielle, mais le terme paralpinisme semble être le seul qui puisse convenir à une dénomination légale.
Le caractère de certains base-jumper me fait souvent penser à ces fameux pilotes d’essais, « capables de réaliser d’incroyables prouesses, au péril de leur vie, avec des nerfs d’acier, un sang froid a toute épreuve » ..mais incapables de se supporter très longtemps et qui finissent par s’entre-déchirer pour un malheureux lyophilisé, rongés par la promiscuité, au fond de leur capsule spatiale … « bienvenue à TOPGUN !!!! »
Plus sérieusement, l’année dernière il y a eu environ 50 morts en parapente dans l’ensemble de l’arc alpin. Ce n’est pas pour cela que l’on a remis en cause l’activité.
Mais il existe une féde, des assurances, etc…
En ce qui concerne l’aménagement :
J’ai toujours pensé qu’un brin de corde ou un spit pour faciliter un accès n’enlevaient rien au plaisir de sauter, bien au contraire...
A ce propos, je tiens à dire que j’ai participé au fameux « massacre du Bournillon »
En effet, ce jour là nous avons coupé quelques branches sur le chemin d’accès au spot pour éviter de déchirer les pantalons. Arrivés au bord, après maintes réflexions nous avons décidé d’élaguer deux buissons pour nous permettre de partir avec 15 mètres d’élan et réaliser des projections d’un autre monde…
En tous cas aucun buisson n’a jamais été coupé et quand je lis « massacre » ou « sauvages » cela me fait quelque peu sourire …un peu élargi le passage, je veux bien, mais il ne faut pas exagérer.
Par contre, vu la fréquentation importante de ce spot, la dégradation du sol sera rapide et si rien n’est fait la couverture végétale va disparaître et il n’y aura pas la belle dalle solide de Magland à la place. (Le site de Magland a connu les mêmes contraintes de part sa notoriété) Donc à suivre …
Pour finir, pour ce qui est du « Grand Esprit du Base du Vercors »: On lui fait gagner quelques secondes …(et quelques centimètres d’ouverture d’esprit ?)
L’intervention sur la confidentialité de ce site soit disant caché de la part de personnes qui elles-même vendent des images de ce même spot au grand public, en format DVD, no comment…
A l’heure où nous allons avoir besoin de dialoguer et négocier avec des délégués à la gestion d’espaces naturels, trouver des arguments pour faire valoir la crédibilité du non-impact sur l’environnement de notre sport, j’ai parfois l’impression que l’intégrisme écologique irrationnel est dans notre camp!
Autre problème prioritaire : les terrains d’atterrissage
En parapente, avant les sites agrées et soutenus financièrement par la fédé, l’existence de parapentistes chasseurs ou agriculteurs a souvent permis de trouver localement des compromis à l’amiable.
Sinon en règle générale le contrat était simple: on vous paye le foin, et en plus vous le ramassez. (des sommes souvent très raisonnables)
De toutes façons, dans de nombreux cas, on ne peut passer outre ce problème financier. A chacun, donc, pour les spots sensibles de négocier localement et surtout de le faire savoir.
La dernière fois ou j’ai sauté à yellow, il y avait un carré fauché avec une chaise et une petite boîte : j’ai déposé 2 euros et cela ne m’a pas posé de problèmes de conscience… ni financiers. Et ça ne m’a surtout pas gâché mon plaisir de sauter.
S’il faut payer un jour une carte de club ou d’accès, ce sera avec plaisir… Les choses auront avancé…
Que nous le voulions ou non, nous serons de plus en plus nombreux.
Demain le base, sport pour tous ? certainement pas !! Mais une augmentation (très nette !) des effectifs semble évidente!
Chaque année voit arriver son lot de nouveaux pratiquants au passé sportif très divers, avec chacun leurs apports personnels de compétences.
Un minimum d’organisation sera nécessaire pour gérer les conséquences de cet engouement et légitimer la pratique d’un sport qui réussira, j’en suis sûr, à devenir tout à fait respectable.
Pour conclure, je ne souhaite pas donner de leçons ou entretenir des polémiques, et je suis bien conscient qu’il y en aura toujours pour poursuivre des combats d’arrière garde, aigris de ne plus être les seuls à pratiquer ce sport d’exception.
Ceux qui trouvent les track pants pas naturels…clownesques..
Les individus qui estiment que l’accès à un spot doit être un risque supplémentaire et qui iront détruire des équipements (comme cela s’est vu à l’Eiger), qui pensent que c’est mieux de faire la gueule à l’exit par ce que l’on ne parle pas la même langue* et qui méprisent parfois les débutants.
Sans oublier toutes ces petites stars locales, en manque de reconnaissance, prêtes à prendre tous les risques, en allant par exemple rouvrir glisseur haut, les spots que tout le monde saute glisseur bas …justifiant au passage des théories aberrantes aux yeux de néophytes.
Pour tous ceux là je n’essaierai pas de vous convaincre: c’est votre choix, d’autres essaient d’avancer et nous serons plus nombreux.
J’insiste encore une fois pour vous rappeler que ce sont là mes convictions personnelles et je conçois très bien que l’on puisse penser exactement le contraire.
Sur ce, je vous souhaite à tous, de très bons sauts, à bientôt à l’exit et base !!!
Christophe blanc-gras
*je n’ai pas aimé lire sur ce site « ces gros… de ricains »: le jour où je lis « ces gros…de frenchies » sur un site étranger je trouverai cela dommage… Enfin …gardons espoir !